Choisir sa lune
bébé
pour Mars
derrière ton sourire
se trame
sans mot
la destruction de la chambre magmatique
les plafonds qui s’effondrent
les manteaux qui s’enflamment
les murs qui se fissurent
les frissons fragmentés
les membres attachés
la bouche bâillonnée
les chaussettes de laine
la laine qui est rouge
les bougies qui sanglotent
les rivières de lave
les roches calcinées
les caresses qui sonnent
les tendres asphyxies
les motifs et motus
les rayons à mon cou
les prévisions sismiques
les strates enlacées
les petits coup de langues
les orteils qui se cambrent
les cuisses qui se tendent
la chambre qui explose
le basalte brûlant
la douceur à mon cou
les cratères du cœur
les rétines reptiles
les serpents qui se terrent
les doutes versatiles
les doutes qui m’échappent
les doutes qui s’échappent
les nuées trop ardentes
les certitudes pleines
les évidences vides
les couinements qui disent
les vérités qui fusent
la chambre qui ré-explose
les plis qui se déploient
les sourires montagnes
les sourires derrière
les sourires devant
le sourire entre-deux
la douleur qui me prend
le plaisir du plaisir
la pression des caresses
les liens qui s’affermissent
le tressage du temps
les plafonds qui s’effondrent
les manteaux qui s’enflamment
les murs qui se rassurent
les frissons fragmentés
les membres détachés
les membres qui s’étirent
les paroles qui disent
les silences qui disent
les oiseaux qui reviennent
les
quand le voyage cesse
je voyage sur les traces
qu’ont laissé la pression
des cordes
les crevasses, les ponts,
et les proies sans défense dans les toiles tissées,
les kilomètres de désirs,
où notre relation s’enchevêtre
près de toi petit galet après la colère après la tristesse retrouvons-nous au bord d’un volcan tranquille le volcan explosera sans doute sûrement même est-il déjà en train d’exploser déjà depuis plusieurs siècles il explose nous nous écouterons dans le fracas tranquille comme un galet au creux de notre couette pendant la sixième extinction des feux pendant la sixième extinction des feux
​
inédit, 2021
​
​
​
​
​
​
« une nuit, une nuit
La nuit s’observe dans le rétroviseur de la voiture : elle a le regard charbon comme Joyce, le sourcil haut comme un oiseau et le teint nude comme Jéranium,
la nuit s’est maquillée de sang, la nuit va danser,
la nuit s’abreuve dans la rivière qui dévore ses souvenirs mais elle se dit que ce n’est pas le moment et elle revient sur le siège mou de sa voiture,
la nuit va danser,
la nuit va au night-club,
la nuit met le contact et le moteur vrombit,
la nuit écrit ce texto : « je pars, je vous retrouve là-bas » et elle l’envoie,
la nuit se promet qu’elle ne va pas vomir,
la voiture de la nuit avance à travers les étoiles répétitives de la route,
la nuit retient ses larmes,
avec le fond de teint
dream nude mousse beige éclat
blush dream touch blush pêche
mascara le colossal cat eyes noir sauvage
les fards à paupières color tatoo 24h immortal charcoal
eternal silver
et pour les sourcils
master drama khôl liner ultra noir
et enfin sur les lèvres superstay
encre à lèvres endless ruby
-
pour ne pas tout gâcher avant d’arriver, la nuit retient ses larmes
avec le fond de teint fluide diorskin nude
effet peau nue beige clair
le diorblush pêche
le mascara diorskin new look noir
et le style liner noir
et enfin sur les lèvres
dior addict extrem luck
-
la nuit retient ses larmes, se concentre sur la route,
avec la crème forever youth liberator
le fond de teint singulier beige doré
le blush radiance n°2
sur les yeux dessin du regard
water proof vert amazone
ombres 5
lumière n°13
vinyl candy palette
mascara volume effet faux cils noir haute densité
et enfin sur les lèvres
rouge pur
couture vernis à lèvres
corail fauve
-
elle est presque arrivée, la nuit veut danser la nuit veut oublier,
avec le fond de teint
perfection lumière
20 beige
la poudre universelle compact jasmin
le blush horizon de chanel
le mascara sublime de chanel
deep brown
le crayon sourcils blond clair
et enfin sur les lèvres
rouge coco paradis
rouge coco paradis
rouge coco paradis
-
maquillée de sang, la nuit danse,
sa sueur se mélange à ses larmes qu’elle ne retient plus
et ça se déverse partout sur son visage
car la nuit se rappelle
que
la nuit n’est qu’une nuit
la nuit n’est qu’une nuit
-
elle ne veut plus oublier,
elle danse toutes les nuits qui ne sont pas revenues,
toutes les nuits battues,
les nuits assassinées
dans la nuit,
dans la nuit massacrée par le silence.
​
version audio Le Perce Mots, lettre d'automne 2023
​
​​​
​​​
​​​
​​​
​​​
​​​
​​​
​​
la chaloupe fluide
(adaptation libre - avec contraintes - du Bateau Ivre d’Arthur Rimbaud)
​
tandis que je matais une série futile,
sur l’écran ces keumés qui prenaient mon regard
furent les proie rêvées des esprits crocodiles
qui les mangèrent nus à la sauce tartare
je me foutais pas mal de tous les attirails,
possessions, privilèges, attributs d’hommes cis
quand finis de gueuler ils s’en vont au bercail
je pus suivre où je veux les ruisseaux insolites
jusque dans les remous furax des flux marins
adelphe surgelée d’une enfance aquarium
je mis les bouts, tout est vendu !! et les terrains
souffrirent mon barouf pas du tout économe
le périph sacra mon coming out viscéral
j’ai déboulé dupèr sur les ondulations :
crosskill sur le chiendent, plante multicéphale,
l’insomnie à pleurer dans le LED des néons !!
du miel pour les poupons : la pulpe âcre des poires,
ce fluide herbeux filtra ma coquille de bois,
des piqûres, des patchs d’hormones, exutoires
éclatant, balayant le dead name et son poids
c’est pourquoi je finis détrempée dans les phrases
marines, macérant de constellations,
m’empiffrant de ciels verts ; où, suspension topaze
et blasé, songeur, un mort fait de l’aviron ;
où, illico, se fardant les paupières, dar,
et les tempi flemmards sous les rougités diurnes,
plus balèzes, plus vifs que la tize et les phares,
se lissent, calcinés, les cheveux de Saturne
je connais des baldaquins houleux, des bourrasques,
des butchs, des avalanches : connais le couchant,
le matin excité, nation d’oiseaux fantasques,
tantôt, j’ai zieuté l’ombre d’un keum ignorant
j’ai zieuté Phébus lourd aux peurs pieuses giclant,
fétichisant d’excessifs coagulants mauves
comme des comédiens de films attendrissants,
la tasse immense aux flux émotifs de vieux fauves !!
songeant la sorgue verte à la mousse glorieuse,
bécots jaillissant des écumes mordicus,
comme une autoroute pour larmes prestigieuses
avec l’aurore blonde et blême de Vénus !!
pistant des jours entiers, comme des salop’ries
furibondes cette onde assaillant des cailloux,
j’ignorais les startups qui inondent Paris,
je m’éclatais la tronche humide comme un clou !!
obsédée sur réseaux par des rôles-modèles
au make-up d’orchidées, aux corps fit, parfaits de
lionnes humaines posant comme un arc-en ciel
au zénith de l’écran, devant des yeux vitreux !!
zieutant la frénésie des marécages, ruches
où dans les nénuphars s’infectent les dragons !!
la culture du viol, l’accalmie fait l’autruche
et les maelstroms croulant perdus par l’horizon !!
neige, fard gris, mer calcaire, azur de cendre
des bails atroces tout au bout des bassins brûlés,
traumas de basilics bouffés de scolopendres
tombant des buissons secs à l’effluve cendrée
moi, je ferais bien voir aux mômes ces mérous
des houles grises, poissons fauves de musique
(quelques moutons-tulipes chantant sur la proue
tandis que m’apostrophe la brise mutique)
toujours accro, sainte lasse de la banlieue,
les stations balnéaires aux larmes fuyantes
trottaient leurs spectres de tulipes toutes bleues,
vers moi-même tombant comme une suppliante...
sur mes pourtours, se baladèrent les touristes
puis les cacas de goèls aux yeux jaunes, bavards,
et puis moi, ligotée, cinglée comme le christ,
je n’ai pas vu les morts se pieuter l’air blafard !!
je fus c’foutu rafiot ficelé dans les golfes,
bazardé par le vent dans un azur sans CAF,
les tanks et les avions d’un connard en rolls-royce
infécond pour sauver mes débris et ma soif,
fluide, flambée, recouverte de frimas mauves,
je fis les quelques brèches rousses du zénith
qui eut, compote pour les poétesses chauves,
de l’apothécie d’or, des vulves de granit,
je fus sprinteuse vive sous les satellites,
dans une course lente au bord des clitoris
alors que les étés tabassaient de leurs bites
les éthers mauves d’infundibulums meurtris
mais je fus la froussarde : ouïr à des kilomètres
le coït des rorquals et les gros tourbillons,
détective infinie des azurés champêtres,
je pleure l’occident aux frontières barbons
j’ai zieuté des îles, agglomérats cosmiques,
pourrie par l’exotisme, legs nauséabonds,
ténèbres éternels, là, tu pionces, pythique,
dans ce présent qui dure : colonisation ??
j’ai trop de pleurs causés par ces matins amers,
Pierrot est un connard, Phébus, relou, se traîne,
et revêche, l’argent vida toute la mer,
ah !! que ma coque explose !! que mon amour me prenne !!
je veux l’unique flotte en occident : la mare
sombre et glacée, où, près du déclin, bon sentant,
une gosse blottie, songeuse, désamarre
une chaloupe folle ; un oiseau du printemps
je me sens lasse, bercée de voluptés vagues,
d’effacer sur la mer le chemin des cargos,
de partir à la guerre, glorieuse, cœur vague,
de m’enfuir sous les néons sales des logos
inédit, printemps 2013 - hiver 2024
​
​
​
​
​
​
​
​
Sexy Store
la nuit pour toi mon cœur clignote jusqu’au bout des orteils
néon rouge faux contact au néant du soleil
​​
​
Romi Jéranium F