top of page

ENTRE LES DEUX AILES

 

 

Elles crachent des soleils mes sœurs

 

Elles tapent des paumes jusqu'au sang, mes sœurs

Elles tapent des pieds en chœur

Elles saignent des talons

Elles se brisent les orteils en sautant

Elles se mordent la langue en même temps

Elles connaissent par cœur, mes sœurs

Chaque géométrie de chaque chorégraphie

Elles dessinent le chaos dans le ciel, mes sœurs

Elles tracent en hurlant

 

C'est des dragons, mes sœurs

Elles me font peur

Mais je suis le seul à avoir la permission de monter sur leur dos

Entre les deux ailes

 

Elles crachent des soleils mes sœurs

 

Elles se tiennent les mains

Elles célèbrent

Elles tournent sur elle-même jusqu'à l’évanouissement

Elles convoquent tous les systèmes solaires à la fois

Elles invitent le cosmos dans la ronde

Elles font n'importe quoi

Elles se transforment en étoiles qui filent et en astéroïdes qui explosent

Elles éclatent leurs forces dans la danse

 

C'est des dragons, mes sœurs

Elles me font peur

Mais je suis le seul à avoir la permission de monter sur leur dos

Entre les deux ailes

 

Elles crachent des soleils mes sœurs

 

Elles se bousillent les cordes

Elles chassent les vampires

Elles baisent les démons

Elles crament les porcs, mes sœurs

Elle raffolent de la viande grillée mes sœurs

Leurs yeux sont secs

Ils ne clignent plus depuis longtemps

Elles ont appris à ne plus fermer l’œil

Elles ont une griffe sous l'oreiller

Une arbalète dans la table de nuit

Elles gardent les donjons

Leurs lèvres ont des dents

Des rangées de canines parcourent leurs colonnes

Leurs os ressortent

Ils sont pointus

Ils cognent

Leur colère les transforme

 

C'est des dragons, mes sœurs

Elles me font peur

Mais je suis le seul à avoir la permission de monter sur leur dos

Entre les deux ailes

 

Elles crachent des soleils mes sœurs

 

Elles exultent

Elles suent, mes sœurs

Elles transpirent le monde en cascade

Elles brûlent leurs colères sous leurs ailes

Elles purgent l'humanité par leur transe, mes sœurs

Elles crachent du feu sur les pieds du Christ

Leur salive est acide

Elles dragonent, mes sœurs

Elles griffent

Elles brûlent

Elles flambent

Elles cendrent et poussièrent

 

C'est des dragons, mes sœurs

Elles me font peur

Mais je suis le seul à avoir la permission de monter sur leur dos

Entre les deux ailes

​​

​

° ° ° ° °

​

​

PROMENONS-NOUS

 

Les garçons se promènent dans les bois

Pendant que le loup n'y est pas

Ils dissimulent leur frimousse derrière des chaperons

Si le loup y était, il les mangerait

Mais les chaperons prennent le risque

Ils se plaisent à rougir en s'égarant dans les branches qui craquent

Leurs paniers sont remplis de capotes et de honte

C'est pour mieux se manger

 

Aussitôt flairés, les chaperons rouges se découvrent

Ils tirent sur les chevillettes de leur slip qui choient en glissant sur leurs bottes

Le long de leurs chevilles

Les garçons rougis se repaissent entre eux et se lubrifient à coups de petits pots de beurre

C'est pour mieux se manger

Leurs dents lacèrent comme des crocs

Les corps s'avalent, se régalent et se transforment

Les chaperons se changent en loups qui se changent en garous

Ils se giclent dans les ventres

Les meutes de gars se trempent en même temps que leurs slips

Ils jouissent en pleurant et se cognent en même temps qu'ils s'embrassent

Ravagés par leurs propres plaisirs honteux

Leurs lèvres se fendent et se rougissent du même rouge qui égratigne leurs genoux

Leurs yeux sont au beurre noir

C'est pour mieux se manger

 

Mais la corne résonne et les chasseurs débarquent

Ils s'apprêtent à casser du loup

À lâcher leurs chiens

À finir d'achever de leurs fusils les bêtes déjà presque mortes

 

Les rouges garçons sont des loups

Et les loups s’entretuent quand ce ne sont pas les chiens qui les poursuivent

La chasse est ouverte

​

​

° ° ° ° °

NOTRE PERE

 

Tu es un trou noir dans la galaxie

Une ruine

Tu es ciel

Marbre

Pierre

Tombe

Roses

Terre

Fourmis

Ton crâne est dans ma main

Ton pull entre la neige et ma peau

Ta main froide coule sur mes joues et me file entre les doigts

La mienne glisse sur ton front gelé

Tu es dans la barbe qui pousse sur mon visage

Tu es dans mes rires

Ma sueur a l’odeur de la tienne maintenant

Je vieillis en te ressemblant

Je vais voler l'homme que tu étais comme tu as volé l'enfant que je veux rester

 

Tu me dois le père noël

Reviens m’annoncer qu’il n’existe pas

Je veux sa tête accrochée au mur du salon

Tu me dois l'argent et la petite souris

Le dentifrice et les sourires

Dédommagements. Réparations

Tu me dois les armes et les outils

Tu me dois l'épée et le marteau

Tu me dois les roulettes du vélo

 

Notre père qui est aux cieux

Tu me dois les genoux

Que ton nom soit sanctifié

Tu me dois le frottement de ta barbe sur la peau

Que ton règne vienne

Tu me dois la chaleur de ton corps

Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel

Tu me dois mes larmes de joies et mes peines de cœur

Donne nous aujourd'hui notre pain de ce jour

Tu me dois le feu du barbecue et l'eau de la piscine

Je te pardonne tes offenses puisqu’il faut pardonner à ceux qui nous ont offensés

Tu me dois les baisers sur la nuque

Délivre-moi du mal

Mais garde avec toi le règne, la puissance et la gloire

Je te les laisse puisqu'ils t'appartiennent

Pour les siècles des siècles

Amen

​​

​Théo Perrache

bottom of page